[extrait] Humanité, une histoire optimiste

     

    On raconte que deux mots étaient autrefois gravés sur le fronton du temple d’Apollon à Delphes. Le temple était un lieu de pèlerinage où les anciens Grecs affluaient de toutes parts en quête d’un conseil divin.

        Gnothi seauton, pouvaient-ils lire à l’entrée.

        Connais-toi toi-même.

        Si l’on parcourt les recherches les plus récentes en psychologie et en biologie, en archéologie et en anthropologie, en sociologie et en histoire, on finit par conclure que l’être humain a eu, des millénaires durant, une image erronée de lui-même. Pendant longtemps, nous sommes partis du principe que l’être humain était égoïste, bestial, voire pire. Pendant longtemps, nous avons cru que la civilisation n’était qu’une fine couche de vernis, qui se craquellerait à la moindre anicroche.

        Cette vision de l’humanité et cette lecture de notre histoire s’avèrent tout à fait irréalistes.

        Dans les dernières parties du présent ouvrage, j’ai tâché d’esquisser le nouveau monde qui nous attend si nous passons à une autre vision de l’humanité. Je n’ai probablement décrit que la partie émergée de l’iceberg. En effet, dès lors que nous acceptons de croire que la plupart des gens sont des gens bien, tout change. Nous pouvons organiser nos écoles et nos prisons, notre État de droit et notre démocratie d’une tout autre façon. Et nous pouvons nous-mêmes mener une tout autre vie.

        Je dois néanmoins vous faire une confidence : je n’aime pas trop les livres de développement personnel. Notre époque est trop tournée vers l’introspection et pas assez vers l’extrospection. La construction d’un monde meilleur ne commence pas par soi-même, mais par nous-mêmes. Ce n’est pas avec une énième liste de trucs et astuces pour réussir sa carrière ou s’imaginer qu’on va devenir riche que nous y parviendrons.

        Mais un jour, un ami m’a demandé si le fait d’écrire ce livre m’avait aussi amené à voir ma propre vie sous un nouveau jour. Je me suis aperçu que la réponse était oui. Une vision réaliste de l’être humain a d’importantes conséquences sur la façon dont on interagit avec les autres.


Bregman, Rutger - Humanité, une histoire optimiste - Seuil

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